samedi, janvier 24, 2009

[Le capital en déroute] Chronique no.1:Rio Tinto

Une nouvelle chronique que nous vous proposons, enfin que nous tenterons de produire de manière régulière, et qui aura pour thème l’analyse de la crise et ses effets sur les travailleurs-euses. Avec la crise à nos portes, malheureusement nous entendrons de plus en plus parler de restructuration, de pertes d’emplois, de licenciement technique et de précarité. Nous tenterons d’analyser à chaque chronique le cas d’une compagnie ou d’un exploiteur qui pour une raison ou une autre tente de maximiser son profit au détriment des travailleurs-euses du Québec. Nous ne nous proclamons pas comme des spécialistes de l’économie, mais bien comme des témoins de cette lutte sans relâche qui oppose le capital aux exploitéEs. Cette semaine le cas de Rio Tinto…

Rio Tinto-NYSE

L’hécatombe
On apprenait cette semaine, que le conglomérat Rio Tinto-Alcan licenciait les 220 employéEs de son usine d’électrolyse de Beauharnois. Une des raisons invoquées en plus de la chute du prix de l’aluminium, c’est la désuétude de l’usine de Beauharnois ouverte en 1943. Cette usine utilise la technologie Söderberg, qui sera éliminée de toutes les usines d'aluminium de première fusion au Québec d'ici 2015, conformément à la réglementation environnementale. « Ce n'est pas parce que les travailleurs ne sont pas bons: ils sont aussi bons que les autres, mais c'est malheureusement l'usine la plus désuète du groupe, avec les coûts de production les plus élevés », a dit le ministre du Développement économique du Québec, Raymond Bachand. (1).

Du côté de l’usine d’Alumine de Vaudreuil, on impose une réduction temporaire de la production de 25%, soit de 400 000 tonnes, ce qui leur permet de justifier le licenciement d’une cinquantaine d’employéEs.

À Jonquière, le Centre de produits cathodiques réduira ses activités liées à la production de carbone de 50%. Environ 17 personnes y perdront leur emploi. De manière grossière, la compagnie justifie ses pertes d’emplois par : « Les mesures d’austérité se traduiront par une réduction additionnelle de 6% de la production d'aluminium et d'alumine et la suppression d'environ 1100 postes à l'échelle mondiale ».

On peut se questionner sur la véracité du nombre de 1100 postes alors qu’en une semaine, ils ont annoncé le licenciement de 300 employéEs seulement au Québec, soit plus de 25% de leur estimation (2). Selon d’autres sources le bilan sera beaucoup plus catastrophique. Le Syndicat de travailleurs canadiens de l’automobile (TCA-Québec), annonçait, la même journée, quant à lui, que le gouvernement du Québec avait accepté la fermeture de 4 usines soit : Vaudreuil (800 emplois), Beauharnois (200 emplois), Shawinigan (600 emplois) et Arvida (650 emplois) (3).

Des licenciements indirects
Par ailleurs, en réunion, le 23 janvier, avec les dirigeants de Rio Tinto-Alcan, les 200 partenaires et sous-traitants Saguenéens, apprenaient qu’ils devront diminuer de 15% leur coût d’exploitation afin de freiner la baisse tendancielle du taux de profit de Rio Tinto. Pour la région, les nouvelles réductions de coûts exigées atteindraient plus de 150 millions de dollars, d'après certaines sources et un nombre encore non déterminé de mises à pied qui s’ajouteront aux licenciements directs annoncés (4). D’ailleurs la firme BPR-Bechtrel, une firme d’ingénierie Montréalaise, dont le principal client est Rio Tinto, devra licencier 330 employéEs au Québec, soit 36% de ses effectifs, suite à la décision de Rio Tinto de mettre sur la glace deux projets d'investissement totalisant plus de 1 G$ d’investissement. Les bureaux les plus touchés risquent d’être ceux du Saguenay (5).

Une baisse tendancielle du taux de profit?

Le secteur automobile est en crise et la construction est en chute libre. Ce sont deux des secteurs qui sont parmi les plus grands demandeurs d’aluminium dans le monde. Ainsi, depuis la deuxième moitié de 2008, le prix de l’aluminium a chuté de moitié en raison de la baisse de la demande. En contrepartie, la logique capitaliste étant à l’augmentation toujours croissante de la production, l’année 2008, fut une année record pour la surproduction d’aluminium au niveau mondial. Un niveau record de 1,3 millions de tonnes fut produit en surplus pour la seule année 2008. Pour la deuxième moitié de l’année 2008, il y a eu une légère augmentation de la demande de 3,1%, mais largement inférieure aux surplus qui ont augmenté quant à eux de 5,7%. Les analystes prévoit quant à eux une diminution de 2% de la demande pour 2009, tandis que les surplus devraient atteindre des niveaux records de 2 millions de tonnes!(6) Cette baisse tendancielle du taux de profit n’est donc qu’un reflet de la suraccumulation de marchandise de l’industrie de l’aluminium.

Une des solutions apportées par Alcan est un nouveau projet pour contrer la désuétude de ces usines qui ne produisent plus assez selon eux. Ces usines opèrent actuellement à profit et à des coûts de 15 % inférieurs à sa moyenne mondiale. Sa solution le projet AP-50, une usine-pilote dans laquelle Alcan s'est engagée en décembre 2006, à investir deux milliards sur une période de dix ans. En contrepartie, Québec a offert un prêt sans intérêt de 400 millions, a prolongé des contrats d'approvisionnement en électricité et a prolongé les droits d’Alcan sur la rivière Péribonka jusqu'en 2058. Un projet qui permettra de construire la cinquième aluminerie la moins coûteuse au Canada (7). Un projet qui aura pour seul but d’augmenter la production d’aluminium lorsque le prix de l’aluminium sur les marchés mondiaux reviendra à la normal.

Mais évidemment l’investissement de capitaux, donc de capital constant dans des installations, implique en contrepartie une diminution des coûts ailleurs, soit le capital variable, afin de maintenir le taux de profit. La seule façon possible est de maximiser l’exploitation des travailleurs tout en diminuant la masse salariale, dans ce cas-ci par des mises à pied massives. Ce qui accroitra encore plus la compétitivité des travailleurs-euses qui craindront maintenant de rejoindre leurs anciens collègues au chômage. Une logique implacable typique du capitalisme moderne en temps de crise, augmenter la plus-value, c'est-à-dire le profit retiré de la force productive des travailleur-euses, en licenciant et en fermant les usines moins productives. Bref, il s’agissait pour eux d’imposer un partage de la valeur ajoutée plus favorable au capital et plus défavorable au travail. Gageons que les conditions d’emploi seront les prochaines concessions que les travailleurs-euses d’Alcan devront faire face afin de « contrer la concurrence » des travailleurs-euses chinoiSes.

Notons au passage que les coûts serons épongé par un prêt sans intérêt par le gouvernement, en plus d’électricité à faible coût ce qui permettra encore plus aux pauvres actionnaires de maintenir leurs dividendes.

Dans cet effondrement du système financier, c’est évidemment les travailleurs-euses qui devront payer au nom du profit et des dividendes des grands capitalistes. L’histoire nous a montré que dans ces moments, l’intensification des luttes sociales peut mener à des bouleversements majeurs.

Solidarité avec touTes les travailleurs-euses des usines de Beauharnois, Vaudreuil et de Jonquière qui sont les nouvelles victimes du capital…

(1) source
(2)Presse canadienne
(3)CNW
(4) Radio-Canada
(5) source
(6) The Australian
(7) Le Devoir

Aucun commentaire: