mercredi, juillet 30, 2008

Chronique littéraire: Cronstadt


Il y a quelques temps, bouquinant chez les libraires usagés, quelle ne fût pas ma surprise de tomber sur un bouquin intitulé Cronstadt. Étant donné le faible nombre de livre traitant de ce sujet, je me suis empressé d'acheter le bouquin, me disant qu'un historien avait possiblement tenter de combler les "trous" historiques des autres livres ayant traités de ce sujet.

D'un point de vue objectif, le fond historique est intéressant. L'auteur relate le nombre incroyable d'émeutes et grèves provoqués par les rationnements imposés aux ouvriers et paysans par le parti bolchévique. Par contre du moment que l'auteur aborde les autres tendance que celle des bolchéviques et des "apôtres" de Trotsky, que ce soit les socialistes révolutionnaires ou les anarchistes (qu'il nomme trop souvent les sans parti), l'objectivité est remplacé par une propagande mal ficelée.

Les anarchistes sont grossièrement représentés comme des anti-sémites et des brigands qui sont anti-bolchéviques, donc évidemment contre-révolutionnaire et allié aux blancs(les troupes tsaristes en exil). L'auteur y dénonce toutes les sources anarchistes comme étant fausses et ne fait que référer et interpréter personnellement ses sources "fiables", soient les archives de la Tchéka(service secret fondé en 1917 par Dzerjinski pour combattre les ennemis des bolchéviques--lire éliminer brutalement). Chaque rapport mentionnant les anarchistes est donc un élément de vérité. Par contre, il est plutôt étrange de constater que tous les rapports traitant des troubles causés directement par la politique de Trotsky, relève selon l'auteur, et ce à plusieurs reprises, de la tendance pro-Staliniste ou pro-Léniniste de la Tchéka!!Quel hasard de constater que l'auteur, Jean-Jacques Marie, est un historien français membre du Parti des Travailleurs, un parti Trostskyste, qui s'est dissout le 15 juin 2008 dans le Parti Ouvrier Indépendant. bref, une analyse révisionniste à la sauce de la 4ième internationale.

En cherchant un peu plus sur cet auteur, je suis tombé par hasard sur cette critique de la CNT-AIT, qui loin d'être élogieuse, rejoint mon analyse de ce livre, qui malgré son côté absurde est selon moi une fraude intellectuelle dans l'ensemble.
Si vous voulez lire un livre sur la révolte de Cronstadt, je ne peux que vous conseiller La Révolte de Cronstadt la Rouge(disponible à l'Insoumise), un recueil de textes édités par nos camarades d'Alternative Libertaire ou La Tragédie de Cronstadt 1921 de Paul Avrich.

Et si vous voulez lire une critique plus complète du livre:

Nouvel assaut sur Cronstadt

dimanche 14 mai 2006

La sortie, chez Fayard (oct. 2005) d’un épais ouvrage ("Cronstadt", Jean-Jacques Marie, environ 480 pages) sur l’histoire de cette forteresse et de sa révolte contre le pouvoir bolchevik (1921) peut sembler une bonne nouvelle. En effet, à part une petite brochure constituée d’extraits divers [1], (et d’un livre d’Ida Mett, voir note [5]), et un petit texte d’Anton Ciliga (voir plus bas), il n’existe à notre connaissance aucun autre ouvrage disponible, en français, sur ce sujet [2].

L’ouvrage est du genre plutôt détaillé. Cependant, il n’apporte aucun fait nouveau par rapport à ceux connus jusqu’à présent, bien que l’auteur ait bénéficié de l’accès à une documentation inédite de première main : les archives soviétiques (essentiellement des rapports de la Tcheka, l’ancêtre du KGB, la sanguinaire police politique). De plus, l’utilisation de ces archives manque de discernement, ou, pour le moins, de commentaires (un peu comme si on essayait d’écrire un livre sur Mai 68 en se basant, sans aucune critique, sur les rapports des Renseignements généraux) Ainsi en est-il des pages où se succèdent les rapports policiers faisant état d’un supposé antisémitisme des insurgés. Les citations sont le plus souvent livrées à l’état brut. Le lecteur ne saura pas quel crédit leur apporter, ni dans quelle mesure elles sont représentatives. L’élaboration d’un "appareil critique" est pourtant le minimum que l’on puisse attendre du travail d’un historien face à de telles archives. L’auteur lui-même renforce cette sensation. Page 125 il explique, sans aucune justification, que des ouvriers empêchent Zinoviev de faire un discours, parce qu’il est...juif (comment l’auteur peut-il savoir qui, du "juif" ou du président du soviet de Petrograd, a été sifflé ? Mystère).

LE PRÉCÉDENT MAKHNOVISTE

Or, et ceci explique peut-être cela, il se trouve que l’auteur a antérieurement publié un autre livre sur la même période : "La guerre civile russe, 1917-1922" (mars 2005, éditions Autrement). Pour l’essentiel, ce dernier n’est constitué que d’un collage de témoignages des uns ou des autres (grossièrement parlant, des "rouges" et des "blancs") sur les aspects les plus sordides de la guerre civile -ce qui n’est pas très utile, mais pourquoi pas ! Il y est, entre autre, question de Makhno. Par exemple, à la page 102 de "La guerre civile", un communiste nous déclare que "Les makhnovistes, n’ayant ni mécanicien ni pilote, incendient les appareils. Puis commence une bacchanale de pillage : les soldats makhnovistes dévastent les magasins, les entrepôts, les riches appartements. Un groupe dans sa fureur met le feu à plusieurs bâtiments. Le Grand Bazar est entièrement pillé. Le comité révolutionnaire bolchevique essaie de convaincre les makhnovistes de procéder à une réquisition ordonnée des biens et des vivres, un makhnoviste lui répond : ’Nous sommes partisans du slogan : "De chacun selon ses capacités à chacun selon ses besoins’". Le lien entre les exactions supposées et l’affirmation idéologique ne saute pas aux yeux. Tout au contraire. Mais l’auteur se garde bien de relever la contradiction patente dans le témoignage qu’il cite. Il utilise les "témoignages" des blancs de la même manière. Page 149, il cite l’un d’entre eux déclarant que Makhno "pillait, brûlait et tuait". Sans commentaire. On croirait lire Marie-Antoinette à propos de la Révolution française. L’auteur lui-même affirme, page 151, que "Makhno n’aime ni la ville, juste bonne à ses yeux à être pillée, ni les citadins, et encore moins les bourgeois qu’il rançonne". Aucune référence ne vient chapeauter cette affirmation sur le goût immodéré de Makhno pour la campagne. Ces citations étant livrées tel quel le lecteur est indirectement prié de les prendre pour argent comptant. Même si c’est de la fausse monnaie. La littérature anti-makhnoviste est une vieille tradition, qu’elle soit rouge, blanche, ou le fait de littérateurs peu scrupuleux, comme Joseph Kessel. Mais qu’un historien, en 2005, continue de charrier ces légendes d’antisémitisme et de banditisme, alors que toutes les clarifications à ce sujet sont depuis longtemps très largement accessibles [3], voila qui laisse un goût amer à cette lecture. Mais, faut-il s’en étonner ? Présenté comme un "spécialiste de l’Union soviétique et du communisme", l’auteur, si l’on en croit sa bibliographie, est surtout un chantre du trotskisme. [4]

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