mercredi, juin 01, 2011
La glaciale rationalité de l’Institut Fraser
Toujours radicalement fidèle à l’idéologie égoïste néolibérale qui l’excite et la finance, la dernière étude de l’Institut Fraser sur l’immigration est d’une insensibilité telle qu’elle devrait – nous avons bien dit : devrait – en faire frémir plus d’un. Or, il semble que ce soit tout le contraire qui se produise. Coiffée d’un titre à tout le moins obscène – « Nos immigrants coûtent trop cher » –, la nouvelle a même fait la manchette du quotidien le plus lu au Québec. Cette étude, soit disant « explosive », reprend essentiellement les arguments tirés d’une autre étude publiée par le même institut en novembre 2010*.
Dans son habituel style comptable, le généreux Institut fait pour nous le portrait du problème, qui est au fond bien simple : les immigrants ne sont pas rentables. Ils ont de moins bons salaires, paient moins d’impôts et ont pourtant droit aux mêmes « privilèges » que les vrais Canadiens. Beaucoup d’immigrants sont d’ailleurs « sous performants », ce qui occasionne, comme on s’en doute, des « coûts croissants » pour le Canada. Même leurs enfants (actuels ou futurs) sont déjà considérés comme un fardeau, normal : ils ne seront « pas en mesure de rembourser le coût monétaire de ce que leurs parents ont imposé aux Canadiens ».
Face à cette problématique quantifiable et mathématique, l’Institut ne revendique pas de meilleurs politiques d’intégration, d’embauche et d’emploi, ni de mesures condamnant la xénophobie de certains employeurs (qui trouveront d’ailleurs dans cette étude de quoi alimenter leurs préjugés). Bien entendu, ce sont les immigrants eux-mêmes qui sont responsables de leur malheur. Le fait que ce soit eux qui aient à subir les nombreux caprices du marché et l’incompétence de l’État n’y change rien : la responsabilité de l’injustice, selon cette logique, incombe directement à celui ou à celle qui la subit. L’objectif, la finalité de l’immigration, bien sûr, est de favoriser d’avantage l’accumulation de profit – on voit mal quel autres objectifs idéalistes elle pourrait bien servir! –, il nous faut donc des immigrants mieux adaptés, vous l’aviez deviné, aux « besoins des employeurs ».
L’Institut réclame donc du gouvernement des mesures afin de serrer d’avantage la vis aux nouveaux arrivants. Si les esprits de notre élite n’étaient pas contaminés par cette froide rationalité calculatrice, elle serait en mesure de voir toute l’horreur qui se trouve derrière ces propositions. Combien de déportations derrière ce « visa de travail » sans lequel, après trois mois de chômage, il faudrait « quitter le pays »? Combien de femmes et d’hommes expulsés puisqu’ils n’ont pas trouvé « un emploi dont le salaire atteint au moins la moyenne canadienne » ? Combien de familles brisées faute de ce « cautionnement couvrant les paiements pour les soins de santé et autres avantages sociaux »? Autrement dit : combien de malheurs et de violence devront subir les immigrants afin de contenter l’Institut et la classe économique dont elle est la porte-parole assermentée?
Selon cette logique, la raison n’est pas au service de la vérité ou du bien commun, c’est plutôt la vérité et le bien commun qui sont au service de la raison marchande. Elle considère ces hommes et ces femmes qui tentent de trouver ici refuge comme des équivalences sans qualité. En ce sens, la vie de l’immigrant n’a de valeur que dans la mesure où elle est monnayable, quantifiable et, finalement, rentable.
*Le coût des étrangers, Le Couac, novembre 2010.
Dans son habituel style comptable, le généreux Institut fait pour nous le portrait du problème, qui est au fond bien simple : les immigrants ne sont pas rentables. Ils ont de moins bons salaires, paient moins d’impôts et ont pourtant droit aux mêmes « privilèges » que les vrais Canadiens. Beaucoup d’immigrants sont d’ailleurs « sous performants », ce qui occasionne, comme on s’en doute, des « coûts croissants » pour le Canada. Même leurs enfants (actuels ou futurs) sont déjà considérés comme un fardeau, normal : ils ne seront « pas en mesure de rembourser le coût monétaire de ce que leurs parents ont imposé aux Canadiens ».
Face à cette problématique quantifiable et mathématique, l’Institut ne revendique pas de meilleurs politiques d’intégration, d’embauche et d’emploi, ni de mesures condamnant la xénophobie de certains employeurs (qui trouveront d’ailleurs dans cette étude de quoi alimenter leurs préjugés). Bien entendu, ce sont les immigrants eux-mêmes qui sont responsables de leur malheur. Le fait que ce soit eux qui aient à subir les nombreux caprices du marché et l’incompétence de l’État n’y change rien : la responsabilité de l’injustice, selon cette logique, incombe directement à celui ou à celle qui la subit. L’objectif, la finalité de l’immigration, bien sûr, est de favoriser d’avantage l’accumulation de profit – on voit mal quel autres objectifs idéalistes elle pourrait bien servir! –, il nous faut donc des immigrants mieux adaptés, vous l’aviez deviné, aux « besoins des employeurs ».
L’Institut réclame donc du gouvernement des mesures afin de serrer d’avantage la vis aux nouveaux arrivants. Si les esprits de notre élite n’étaient pas contaminés par cette froide rationalité calculatrice, elle serait en mesure de voir toute l’horreur qui se trouve derrière ces propositions. Combien de déportations derrière ce « visa de travail » sans lequel, après trois mois de chômage, il faudrait « quitter le pays »? Combien de femmes et d’hommes expulsés puisqu’ils n’ont pas trouvé « un emploi dont le salaire atteint au moins la moyenne canadienne » ? Combien de familles brisées faute de ce « cautionnement couvrant les paiements pour les soins de santé et autres avantages sociaux »? Autrement dit : combien de malheurs et de violence devront subir les immigrants afin de contenter l’Institut et la classe économique dont elle est la porte-parole assermentée?
Selon cette logique, la raison n’est pas au service de la vérité ou du bien commun, c’est plutôt la vérité et le bien commun qui sont au service de la raison marchande. Elle considère ces hommes et ces femmes qui tentent de trouver ici refuge comme des équivalences sans qualité. En ce sens, la vie de l’immigrant n’a de valeur que dans la mesure où elle est monnayable, quantifiable et, finalement, rentable.
*Le coût des étrangers, Le Couac, novembre 2010.
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Le processus canadien de sélection des immigrants devrait mettre l'accent sur les offres d'emploi; les politiques actuelles imposent un lourd fardeau aux contribuables
Contacts pour les médias:
Patrick Grady
Herbert Grubel
Date de sortie: May 17, 2011
VANCOUVER (C.-B.)—Le processus canadien de sélection des immigrants doit être renouvelé afin de mettre l’accent sur l’admission de personnes ayant reçu une offre d’emploi et possédant des compétences recherchées par les employeurs canadiens. C’est la recommandation d’une nouvelle étude publiée aujourd’hui par l’Institut Fraser, l’organisme de recherche en politiques publiques le plus réputé au pays.
« Les immigrants récents gagnent un revenu qui s’établit en moyenne à seulement 72 % de celui des autres Canadiens et paient environ la moitié de l’impôt sur le revenu versé par les autres contribuables. Parallèlement, ils reçoivent des services publics et des transferts du gouvernement d’une valeur qui s’approche de ce que reçoivent les autres Canadiens », a souligné Herbert Grubel, coauteur de l’étude, senior fellow à l’Institut Fraser et professeur émérite à l’Université Simon Fraser.
« En conséquence des politiques de l’État-providence canadien, de l’impôt sur le revenu à taux progressif et des programmes sociaux universels, ces immigrants imposent un lourd fardeau fiscal aux contribuables canadiens. »
En se fondant sur des données rendues disponibles par le gouvernement, l’étude – qui s’intitule Immigration and the Canadian Welfare State 2011 – calcule la différence entre la contribution fiscale des immigrants et la valeur des services publics qu’ils reçoivent. Cette différence, qui se chiffre à 6051 $ par immigrant en 2006, représente un coût total pour les contribuables canadiens qui s’estime entre 16,3 milliards de dollars et 23,6 milliards de dollars chaque année.
« Ce montant est substantiel et il ne fera que croître aussi longtemps que les politiques actuelles d’immigration resteront en place », a affirmé Patrick Grady, consultant en économie et coauteur de l’étude.
Par exemple, l’étude souligne que les immigrants sélectionnés en vertu du processus de parrainage familial représentaient 22,1 % des immigrants reçus au Canada en 2009. Seulement 16,2 % des immigrants furent sélectionnés par le gouvernement fédéral en tant que travailleurs qualifiés ou en raison d’autres caractéristiques contribuant à leur succès économique.
Suite...
« Avec le vieillissement de la population et des engagements non capitalisés des programmes sociaux de plus en plus importants, le Canada ne peut tout simplement pas se permettre d’assumer les coûts croissants découlant d’une piètre sélection des immigrants », selon M. Grubel.
MM. Grubel et Grady concluent qu’afin d’alléger le fardeau fiscal imposé aux contribuables, le processus canadien de sélection des immigrants devrait être réformé en mettant l’accent sur le recours aux forces du marché pour remplacer l’inefficace système actuel d’attribution de points pour choisir les immigrants. Ils font les recommandations suivantes :
* Délivrer des visas de travail temporaires pour permettre l’entrée au pays des candidats ayant reçu une offre légitime d’un employeur canadien pour occuper un emploi dont le salaire atteint au moins la médiane de la province où ils travailleront;
* Les visas de travail seront valides pour une période de deux ans et pourront être renouvelés pour deux années supplémentaires si la personne démontre qu’elle occupe toujours un emploi;
* Les époux et les enfants à charge des détenteurs d’un visa de travail pourront être admis au Canada en vertu d’un programme de visas de travail familiaux, qui les autoriserait à accepter un emploi;
* Les détenteurs d’un visa de travail qui perdent leur emploi auront un délai de trois mois pour en trouver un nouveau, sans quoi ils devront quitter le pays, à moins que leur époux occupe un emploi en vertu du programme de visas de travail familiaux;
* Après avoir passé quatre ans au Canada tout en occupant un emploi de manière continue, les détenteurs d’un visa de travail pourront obtenir un visa permanent. Les candidats ayant reçu le statut de résident permanent seront admissibles à la citoyenneté deux ans plus tard;
* Les immigrants pourront accueillir leurs parents et grands-parents au Canada en tant que résidents permanents après avoir déposé un cautionnement couvrant les paiements pour les soins de santé et autres avantages sociaux.
« Le système que nous proposons éliminerait la nécessité pour le gouvernement de déterminer arbitrairement le nombre d’immigrants qui devraient être admis au Canada, de même que les compétences qu’ils doivent posséder. Ces décisions peuvent être prises plus efficacement par les employeurs et le marché du travail », a affirmé M. Grady.
http://www.fraserinstitute.org/fr/research-news/news/display.aspx?id=17548
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