samedi, janvier 09, 2010

Emeutes au sud de l'Italie suite à une attaque raciste

Ce billet propose un résumé des dépêches tombées ces derniers jours sur le blog du jura libertaire (http://juralibertaire.over-blog.com/).

A Rosarno, commune de la province de Reggio de Calabre, a éclaté, jeudi 7 janvier 2010, une révolte de travailleurs immigrés, pour l'essentiel originaires d'Afrique. Ce vendredi matin, 8 janvier 2010, la révolte continuait. Les travailleurs immigrés africains ont occupé la rue pour se défendre. Ils ont fait la démonstration de leur refus d’être des humains invisibles, des mains sans droits qui doivent toutefois cueillir avec délicatesse des clémentines odorantes et pour le reste de vivre avec les rats comme des rats.



À l’origine de ces incidents, des jeunes gens circulant en voiture avaient tiré avec une carabine à air comprimé sur un groupe d’immmigrés rentrant du travail, blessant plusieurs d’entre eux. Pour protester contre cette attaque, les immigrés ont manifesté dans les rues de Rosarno, incendiant des véhicules et des poubelles et frappant avec des bâtons les maisons et les vitrines des magasins. La télévision a diffusé des images montrant des dizaines d’Africains brisant les vitres de voitures à l’aide de barres de fer et de pierres et mettant le feu à des véhicules et à des poubelles. Les immigrés, dont certains brandissaient des pancartes «Nous ne sommes pas des animaux» et «Les Italiens ici sont racistes» ont bloqué des routes et se sont heurtés à la police anti-émeutes. Plusieurs d’entre eux ont été arrêtés.



En décembre 2008 déjà, des travailleurs immigrés du Ghana et du Burkina Faso étaient descendus dans la rue à Rosarno : deux de leurs camarades avaient été gravement blessés suite à des tirs de kalachnikov en provenance d’une voiture. Un de ces nombreux «incidents» qui illustrent une «chasse aux Noirs», dans un contexte d’hyper-exploitation qui s’appuie conjointement sur les réseaux mafieux et la politique du gouvernement Berlusconi, symbolisé en la matière par le ministre Roberto Maroni de la Ligue du Nord.


Dans cette région, les immigrés sont employés comme journaliers pour la récolte des fruits et des légumes. Quelque 1500 d’entre eux vivent dans des usines abandonnées, sans eau courante ni électricité et pour plusieurs mouvements des droits de l’homme, ces travailleurs sont directement exploités par le crime organisé. Le principal syndicat italien Cgil compte environ 50'000 travailleurs immigrés dont les conditions de vie, sont similaires à ceux de Rosarno. Les ouvriers agricoles passent en effet d’une région à l’autre au fil des saisons et du type de produits à récolter. En ce moment en Calabre et Sicile, c’est la période des agrumes (clémentines, oranges).La Cgil a dénoncé l’emprise de la mafia surtout dans le sud de l’Italie sur ces immigrés massivement employés dans l’agriculture, qui représentent «une main d’œuvre à bas coût». Le syndicat a critiqué le discours sécuritaire du ministre Maroni, soulignant que ces immigrés «touchent des salaires de misère, ont des horaires épouvantables, équivalant à l’esclavage».



Pour reprendre la formule d’un des travailleurs : «Nous vivons entre les rats et la peur.» Un autre, originaire du Maroc, confie au journaliste Attilio Bolzoni du quotidien La Repubblica : «Je vis dans la peur, la peur de faire savoir à ma famille comment je vis en Europe.» En fin d’année dans la région de Rosarno, chaque matin, des «contremaîtres» arrivent devant les baraques avec des camionnettes pour engager ces travailleurs immigrés qui n’ont littéralement plus rien si ce n’est leurs bras — de jeunes hommes — pour travailler 12 à 14 heures par jour, pour 20 euros, en payant 5 euros pour le «transport».

Le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) s’est dit quant à lui très préoccupé vendredi d’un risque de «chasse aux immigrés». Vendredi, un sit-in a réuni environ 2000 immigrés dans le centre de Rosarno, selon les médias italiens, tandis qu’une dizaine d’habitants bloquaient des voies d’accès et d’autres occupaient la mairie pour demander d’éloigner les immigrés de la ville. Le ministre de l’Intérieur Roberto Maroni, membre du parti anti-immigrés Ligue du nord, a affirmé que ces tensions étaient le résultat d’«une trop grande tolérance face à l’immigration clandestine». Mme Boldrini, porte-parole de l’antenne italienne du Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés, a quant à elle souligné la présence parmi les immigrés de réfugiés politiques et demandeurs d’asile, et estimé que les autorités devaient commencer par rechercher les auteurs de l’agression contre les immigrés.


A l'heure actuelle, les émeutes qui ont éclaté avant hier à Rosarno en Calabre ont fait officiellement plus de 60 blessés parmi lesquels une trentaine d’Africains dont deux hospitalisés parmi lesquels deux qui sont dans un état très grave (l’un d’eux agressé à coups de barres de fer est en neurochirurgie). Il semblerait que la chasse aux Noirs soit ouverte, plusieurs immigrés s’enfuient d’eux-mêmes et il y a aussi des transferts opérés par les autorités (350 transferts à Crotone dans un CPA, centre de premier accueil, un centre pour trier les étrangers arrivant sur le sol italien). Sept Africains ont été arrêtés parmi lesquels cinq ont semble-t-il été placés en détention sur décision judiciaire. Aucune décision n’a encore été prise pour les quelques autochtones arrêtés pour avoir agressé des étrangers.

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